L’église que ni l’Empire Romain, ni Daesh n’ont pu détruire

Près de Manbij, au Nord-est de la Syrie, des archéologues ont mis à jour un lieu de culte enterré, remontant au IIIe ou au IVe siècle après Jésus-Christ.

Ce n’est pas plus qu’un trou dans la roche, empuanti par les ordures que les combattants de Daesh ont laissées là avant de fuir. Mais l’archéologue Abdulwahab Sheko, qui dirige les visites, sait qu’il recèle des trésors. Il est heureux que les djihadistes, qui ont tenu la région pendant plus de deux ans, n’aient jamais su ce qu’il y avait là. Eux qui ont ponctué leur sinistre règne de destructions de lieux de cultes en tous genres, comme la « tombe de Jonas », n’auraient certainement pas manqué de faire un mauvais sort à cette église antique.

Une église secrète

Passée l’entrée anodine, un escalier s’engouffre dans les profondeurs, pour révéler un réseau complexe, couvert de croix et d’inscriptions en grec – la langue de l’Empire romain à l’Est – citant la Bible. Selon l’archéologue, cette entrée faisait office de poste de garde. Devant l’ouverture, il y avait un coin discret ou un vigile pouvait se tenir, prêt à avertir ses frères chrétiens, restés à l’intérieur, si quelqu’un venait. Le réseau souterrain lui-même est percé de sorties de secours antiques, qui mènent sous des roches, probablement des sortes de portes dérobées. Grâce à ce réseau, les chrétiens n’étaient pas pris au piège en cas d’alerte.

Tout le site est marqué par l’importance des persécutions qui ont dû avoir lieu dans la région, sous la domination romaine. Les autorités romaines, jusqu’à l’édit de tolérance religieuse, dit « de Milan » de l’empereur Constantin (313), considéraient en effet les chrétiens comme dangereux pour la stabilité de l’Empire, et les ont soumis à des vagues de persécutions.

Des catacombes syriennes

Outre la présence des symboles chrétiens, des restes humains, dans une tombe ont été trouvés dans le site syrien. Enfin, au terme d’un dédale d’étroits tunnels, essaimé de torchères pour la lumière, trois marches mènent à un autel. De toute évidence, les messes devaient être dites en catimini, loin des oreilles des autorités.

Selon John Wineland, professeur d’histoire et d’archéologie de la Southeastern University (Floride), cette étonnante église enterrée pourrait démontrer que les chrétiens étaient déjà nombreux, bien implantés en Syrie. Wineland fait le rapprochement avec l’époque contemporaine, pendant laquelle les Chrétiens syriens ont été décimés : « Certains ont été tués, d’autres ont fui, d’autres enfin ont été contraints de se convertir à l’islam », rappelle-t-il.

En attendant la campagne de fouille

En 2014, Abdulwahab Sheko était sur le point de commencer une campagne de fouille sur le site, quand les djihadistes sont arrivés. Il a dû ronger son frein jusqu’en 2017, date à laquelle il a pu commencer les premières observations. Mais la zone reste dangereuse, en raison en particulier des mines antipersonnel que les djihadistes laissent derrière eux. L’archéologue tient à préciser qu’il fait son possible pour que cette église soit préservée, bien qu’il soit lui-même musulman : « Nous sommes musulmans, mais pas des musulmans comme ceux de l’État islamique. Nous prenons soins des ruines chrétiennes. Nous les respectons. Nous respectons l’humanité ».

Source aleteia.fr

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